Pour la cinquième fois consécutive, FINN a analysé la manière dont une cinquantaine de grandes entreprises belges ont rendu compte de leurs émissions de CO2 dans leur rapport de durabilité. Les progrès continuent, bien que des fissures apparaissent ici et là.

Rapports de durabilité: le groupe de tête est devenu un peloton

Au vu de notre précédent classement, 2023 s’était avéré être une année charnière : plus de la moitié des entreprises avaient rejoint pour la première fois le groupe de tête. Cette année, la tendance est encore plus marquée : près de 70 % des entreprises font partie des « meilleures de leur catégorie » (68 % pour être précis) : elles se fixent des objectifs quantifiés en matière de carbone pour 2030 ou avant, et partagent des plans d’action concrets pour atteindre cet objectif. Elles se réfèrent également à l’initiative Science-Based Targets (SBTi), qui fait office de référence en matière d’objectifs de développement durable.

L’ex-groupe de tête est donc devenu un peloton. A travers de nombreux rapports, on réalise à quel point l’avènement du CSRD a mis les entreprises en mouvement et comment des ambitions énoncées il y a plusieurs années prennent aujourd’hui réellement forme pour la première fois. Galapagos et Econocom, par exemple, ont grimpé de trois niveaux d’un seul coup.

Par ailleurs, de nombreuses entreprises intègrent aujourd’hui leur rapport de développement durable dans leur rapport annuel, signifiant par là que les deux sont étroitement liés. Ainsi, les chiffres relatifs au développement durable apparaissent de plus en plus souvent aux côtés des autres « indicateurs clés de performance ».

De plus en plus d’entreprises communiquent sur leur « scope 3 »

Une autre tendance se confirme : de plus en plus d’entreprises s’emploient à rendre compte de leurs émissions « scope 3 ». Ces émissions indirectes générées à la fois en amont et en aval de leurs activités (fournisseurs ou clients, par exemple) , sont généralement les plus difficiles à mesurer. Or pas moins de 41 entreprises – soit une augmentation de 20 % – incluent désormais le scope 3 dans leur rapport.

Un peloton étoffé signifie aussi peu de retardataires : seules Katoen Natie et Ravago se maintiennent encore dans notre groupe le plus bas. En outre, on remarque que les coopératives sont relativement plus représentées dans les régions inférieures. peut-être l’alignement de toutes les parties y nécessite-t-il plus de temps.

Objectifs ratés, priorités revisitées

Dans nos analyses précédentes, nous avions indiqué que l’on pourrait, à terme, assister à des « avertissements de durabilité », comparables aux avertissements sur bénéfices des sociétés cotées en bourse. Nous voyons à présent de tels exemples apparaître dont Argenta, qui déclare ouvertement ne pas avoir atteint son objectif intermédiaire.

Cela montre que les progrès sont rarement linéaires et ponctués de pics et de creux,l’évolution des activités pouvant se mettre en travers des objectifs annoncés : acquisition, reprise plus importante qu’escomptée des voyages d’affaires après la pandémie, baisse ou une hausse de l’activité d’un département par rapport à un autre,…

A cet égard, Belfius a marqué les esprits lorsqu’elle a fait savoir au début de l’année, via son rapport ESG, qu’elle quittait le SBTI. La banque estime que l’accent mis sur le climat entrave une transition équitable (lire : nous ne pouvons pas accorder de prêt immobilier à certains de nos clients parce que leur logement n’est pas suffisamment durable). Nous n’excluons pas que d’autres entreprises fassent de même à l’avenir.

NOUVEAU – des rapports spécifiques sur le climat

Cette année marque aussi l’apparition de rapports entièrement consacrés à la décarbonisation, preuve de l’importance croissante que certaines entreprises, telle Argenta, accordent à la problématique CO2. Ainsi, AB Inbev dispose d’un rapport Net Zero Ambition, quand Sibelco publie un rapport distinct sur le climat.

À noter également : KBC publie un aperçu synthétique de tous ses rapports. Parmi ceux-ci figure un « Report to Society’» destiné aux « clients, aux employés et à la société en général ». Le signe, sans doutes, de la technicité croissante des mesurages ESG ( (analyses de double matérialité, etc….) qu’il convient d’expliciter.

Il reste difficile de comparer les résultats des entreprises au niveau de durabilité

« On ne compare pas des pommes avec des poires », dit l’adage. Réclamée notamment par les investisseurs et les banques, une méthode uniforme de reporting semble pourtant relever, encore aujourd’hui, du fantasme.

Quand certaines entreprises communiquent sur leurs émissions absolues (totales) de CO2 , d’autres s’en tiennent à des mesures d’’intensité (émissions par unité ou tonne produite). Certaines comparent leurs émissions avec celles de l’année précédente, d’autres avec une année de référence établie sur une base subjective. Difficile donc d’établir des benchmarks solides au départ d’un tel panier de pommes, de poires et même de mandarines…

Ceci étant dit, la lecture des rapports suggère une prise de conscience de plus en plus claire que le véritable défi des entreprises réside dans l’indispensable découplage, soit la capacité de dissocier au maximum ses émissions de son volume de production.

Notons enfin que, confrontée à une redéfinition de leur périmètre, plusieurs entreprises (UCB, Ageas, Beaulieu,…) n’en n’ont pas fini avec l’ajustement de leur mesurage d’émissions.

Scope 3 : le monde des affaires complet au vert ?

Cette année encore, de grandes ambitions afin de réduire ses émissions « de scope 3 » se font jour. Une citation d’Aurélie Comhaire, responsable du développement durable chez Vandemoortele, résume bien la situation. Lorsqu’on lui demande quelle a été, selon elle, la plus grande réussite de l’année écoulée, elle répond : « les progrès considérables que nous avons réalisés en matière d’approvisionnement ».

Greenyard, Proximus et Umicore, parmi d’autres, déclarent elles aussi encourager (comprendre : obliger ?) explicitement leurs fournisseurs à être aussi ambitieux qu’elles et, dans certains cas, à se fixer des objectifs scientifiques. Un article récent de De Tijd s’est interrogé – à juste titre selon nous – sur ce que cela signifiera pour les nombreuses PME de notre pays : sont-elles aujourd’hui suffisamment équipées/grandes pour participer au mouvement ? L’avenir nous le dira.

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Nos références : AB Inbev, La Lorraine, Lhoist, Vandersanden, Saint-Gobain Belgique, Spadel

Méthodologie

Nous avons repris dans notre échantillon les sociétés à ancrage capitalistique belge dont la taille est mesurée sur base de leur chiffre d’affaires 2018. Nous avons retiré de l’échantillon les holdings purement financiers et les sociétés de trading.

Nous nous sommes basés sur les derniers rapports annuels publiés avant le 1 juin 2024 (aussi bien financiers que CSR/durabilité), ainsi que sur les sites web corporate de ces sociétés.

Nous les avons analysés à travers 7 questions :

  • La société exprime-t-elle un engagement en matière de développement durable et/ou présente-t-elle des initiatives concrètes ?
  • Se livre-t-elle à un reporting spécifique sur la durabilité, y compris des données chiffrées ?
  • La société a-t-elle publié son emprunte carbone, chiffres à l’appui ?
  • Quel en est le scope (1, 2, 3)?
  • La société communique-t-elle des objectifs de réduction CO2 clairs et chiffrés (au niveau du groupe) ?
  • L’entreprise communique-t-elle des plans chiffrés de réduction d’émissions CO2 à l’horizon 2030 ou plus tôt ?
  • Fait-elle une référence explicite au SBTi ?

Notre recherche n’a pas pour intention de juger des ambitions de décarbonisation, de leur alignement avec les objectifs des accords de Paris ou encore de la crédibilité des plans entrepris par les entreprises, mais bien de la façon dont elles communiquent à ce sujet.

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