(photo: Ivan Put)

Didier Bellens (Belgacom) succède à Jean-Luc Dehaene (l’ancien Dexia) en tant que dirigeant belge dont on parle le plus dans la presse en 2012. Le classement annuel de FINN et Auxipress se base sur le nombre de présences des CEO belges dans les médias (journaux, magazines, télé, radio). Bart Verhaeghe (Uplace) finit deuxième. Le top cinq est complété par Pierre-Olivier Beckers (Delhaize), Albert Frère (GBL) et Karel De Boeck (Dexia).

Alors que 2011 était l’année de la crise bancaire et de la commission Dexia, 2012 figure, à en juger de la presse, comme l’année de l’entrepreneur. La presse raffole des histoires d’entrepreneurs. Très probablement parce qu’en ces temps de crise, les histoires positives, les histoires de croissance et d’optimisme sont recherchées.

Méthodologie

Auxipress a dressé la liste des apparitions dans la presse (imprimée, et pour la première fois à la radio et à la télévision) des entreprises belges les plus importantes et des leaders d’entreprise entre le 30/11/2011 et le 1/12/2012.

Les paramètres utilisés sont: 

  • Le nombre d’articles dans lesquels le directeur de l’entreprise a été cité
  • Le nombre d’interviews à la radio et à la télévision
  • Mentions de l’entreprise 

2012 : L’année de l’entrepreneur

Là où 2011 était l’année de la crise bancaire et de la commission Dexia, 2012 figure, à en juger de la presse, comme l’année de l’entrepreneur.

En suivant l’actualité en 2012, on en avait déjà eu l’impression, et cela s’est confirmé dans les classements : la presse raffole des histoires d’entrepreneurs. Comme le montre notre classement des « CEO Rockstars » , la presse identifie facilement les entreprises à leurs fondateurs.

FINN CEO ranking

La tendance existait déjà jour l’année dernière, mais elle est aujourd’hui plus prononcée, surtout dans le cas des start-up technologiques : Xavier Damman avec Storify, Dries Buytaert avec Drupal, Davy Kestens et Twitspark, Inge Geerdens et CVWarehouse. Et bien entendu : Urbain Vandeurzen, qui a vendu en 2012 son ‘bébé’ LMS à Siemens.

Bart Verhaeghe fait également partie de la catégorie des fondateurs et des entrepreneurs. Cet entrepreneur polarisant a dominé en grande partie les colonnes de l’actualité avec son projet de méga-centre commercial Uplace à Machelen, mais également avec sa conquête du Club de Bruges.

Mais d’où vient cette fascination de la presse pour les entrepreneurs en 2012 ? Peut-être parce qu’en ces temps de crise, on cherche les histoires positives, les histoires de croissance et d’optimisme. Et évidemment les entrepreneurs ambitieux, comme Verhaeghe, Vandenhaute et Duchâtelet, n’ont pas peur des déclarations fortes et déterminées, qui fonctionnent bien dans la presse. « Vier va redessiner le paysage télévisuel ». « Uplace arrive ».

On dit souvent des médias qu’ils ne se focalisent que sur les actualités négatives, mais ce n’est pas mon avis. Les médias sont à la recherche de récits pouvant confirmer les tendances, mais quand les tendances deviennent trop dominantes, ils n’hésitent pas à chercher le contrepoint. À une époque où la récession domine les actualités, et oú on parle presque quotidiennement de la problématique en Grèce ou en Espagne, les histoires d’entrepreneurs optimistes et visionnaires sont plus que bienvenues.

Et il va de soi que les médias aiment bien parler des CEO et entrepreneurs combatifs, et plus que tout des vainqueurs visionnaires (Dries Buytaert, Inge Geerdens, Sébastien de Halleux). Voici ce que dit Reid Hoffman de LinkedIn : « to be successful, you have to be contrarian – and right. » C’est, selon moi, la raison pour laquelle la presse est également intéressée par les CEO et entrepreneurs. Des opinions contraires sont partagées avec plaisir, du moment que le CEO en question a du succès.

Prévisions pour 2013

Que signifie tout cela pour les dirigeants et les leaders d’entreprise ? D’après nous, la recherche des histoires à succès va s’élargir aux grandes entreprises, et ne va plus se limiter aux plus petits acteurs.

Toute personne qui, en 2013, arrivera à se positionner en tant que ‘dirigeant entrepreneur’ – c’est-à-dire toute personne qui pourra montrer que son entreprise est en mesure de travailler de manière énergique, visionnaire et innovatrice – pourra, selon nous, répondre aux attendes des médias, toujours à la recherche de leaders d’opinion pour confirmer et affirmer les nouvelles tendances. Celui qui pourra se positionner dans cette niche en premier lieu et de la meilleure manière aura, je pense, de bonnes chances d’avoir une bonne couverture de presse l’année prochaine.

En outre, les prévisions macro-économiques pour 2013 sont légèrement plus favorables (même si cela peut changer demain). Il se peut que l’attention des journalistes se soit jusqu’ici dirigée sur les plus petites entreprises, parce qu’ il n’y avait pas d’histoires de croissance ou de gagnants visionnaires auprès des plus grandes entreprises. Mais dès que les ‘grands’ auront leurs propres histoires à succès, les ‘petits’ perdront très probablement leur place à la une des journaux.

Tout change très vite au sommet

Le top 5 est radicalement secoué par rapport à l’année dernière – plus de Jean-Luc Dehaene ou de Mariani, Karel De Boeck (Dexia holding) et Jos Clijsters (Belfius, auparavant Dexia Banque) ont pris leurs places.

Marc Coucke a également disparu, et a été remplacé par Bart Verhaeghe en tant qu’entrepreneur/saint-patron du sport. Pierre-Olivier Beckers, CEO de Delhaize, a fait une remontée spectaculaire : il est passé de la 13e place l’année dernière à la 3e cette année, avec plus de 1000 mentions dans la presse. Didier Bellens et Albert Frère restent en tête du classement.

Différences entre la Wallonie et la Flandre

Dans les grandes lignes, on retrouve les mêmes noms que l’année dernière, mais il existe d’importantes différences régionales.

Roland Duchâtelet est par exemple proéminent dans la presse francophone, alors que Bart Verhaeghe et Wouter Vandenhaute dominent la presse néerlandophone. Tous les trois sont entrepreneurs, et jouent un rôle important dans le milieu du sport.

Même dans l’intérêt suscité par les ‘joyaux de la couronne’ on peut trouver des différences régionales marquées. Bert De Graeve (Bekaert) et Baron Buysse ont été pratiquement 10 fois plus mentionnés dans la presse néerlandophone que dans la presse francophone. De Graeve fait partie du top 5 en ce qui concerne la partie néerlandophone, mais n’atteint que de justesse le top 20 du côté francophone. Dans notre travail quotidien, nous pouvons également constater que la presse néerlandophone et la presse francophone tiennent des agendas totalement différents.

Les seuls noms revenant dans les deux top 5 sont ceux de Didier Bellens et de Karel De Boeck.

Média audiovisuel ou media imprimé : deux choses différentes

Les résultats démontrent clairement que la télévision et les médias papier n’obéissent pas aux mêmes règles. Johan Beerlandt de Besix se trouve à la 27e place en ce qui concerne les mentions dans la presse écrite, mais est le grand numéro 1 à la télévision. Au printemps, Beerlandt a en effet dévoilé être à la recherche d’un successeur pour la direction de Besix, une des plus grosses entreprises non-cotées en Bourse de notre pays.

Les jeunes recrues telles que De Halleux ou Buytaert font ici aussi de très bons résultats – peut-être parce que leur attrait transcende la presse d’affaires et offre une histoire à caractère humain.

Pierre-Olivier Beckers (Delhaize)

Si l’on examine les word clouds de Pierre-Olivier Beckers, on remarque directement qu’il se retrouve dans la catégorie du ‘CEO financier’. Contrairement à la majorité de ses collègues du top 5 des CEO les plus mentionnés, il n’est pas beaucoup question de facettes humaines dans son word cloud. On y parle de bénéfices, d’emplois, de marges, de parts de marché, de millions et de pourcentages, et des résultats décevants de la chaîne Food Lion qui fait partie de la chaîne Delhaize aux Etats-Unis.

Cela peut être une stratégie volontaire de l’entreprise de mettre en avant le CEO en tant que porte-parole pour les actionnaires : Delhaize est finalement cotée en Bourse et doit se tenir à des règles strictes en ce qui concerne la communication des résultats.

Cette stratégie a évidemment des conséquences au niveau du charisme – tant pour la personne de Beckers que pour Delhaize. Beckers se retrouve ainsi en 29e position sur la liste ‘CEO Rockstars’ : bien qu’il soit souvent cité, il ne transparait pas vraiment en tant que personne, et ne « pèse » pas sur l’entreprise d’après les journalistes. Ce n’est pas nécessairement conforme à la réalité – mais les médias aiment bien les personnages où l’on retrouve un côté plus humain.

Roland Duchâtelet : <>

Le word cloud de Roland Duchâtelet, tout comme celui de Bart Verhaeghe, montre que l’association des CEO au monde sportif reçoit beaucoup d’attention dans la presse (voyez les mots comme ‘club’, ‘football’, ‘joueurs’, Duchâtelet étant le président du club de foot du Standard). On retrouve également des mots tels que ‘riches’ et ‘fortune’ : les récents déménagements des Français fortunés qui viennent s’installer en Belgique pour des raisons fiscales ont attiré l’attention de la presse (surtout francophone). Duchâtelet semble être un des ‘riches’ qui a bien voulu discuter avec la presse à ce sujet.

Didier Bellens : Fagard, toujours

Il ressort des articles à propos de Didier Bellens que l’effet Fagard n’est pas encore éliminé (surtout dans la presse néerlandophone): son nom apparait de façon assez proéminente dans le word cloud. Ceci s’explique par la manière dont les médias interprètent l’actualité : lors de nouvelles crises, la presse se réfère souvent aux crises passées : « Bellens, qui a été mêlé l’année dernière à l’affaire Fagard, … »

Le mot ‘ontslag’ (licenciement) frappe : Bellens a échappé de peu à un licenciement, mais a su convaincre son Conseil d’Administration afin de le laisser à la tête de Belgacom. C’est de cela que découle également la proéminence des mots tels que PS, Di Rupo et Magnette. D’autre part, Bellens conserve l’image du ‘CEO bonus’ : primes, actions, bénéfice et actionnaires sont en harmonie.

LES ENTREPRENEURS : Sébastien de Halleux (Playfish), Xavier Damman (Storify), Dries Buytaert (Acquia),Davy Kestens (Twitspark), Inge Geerdens (CV Warehouse)

Ce qui frappe lorsque l’on regarde les word clouds des jeunes entrepreneurs tels que Davy Kestens et Xavier Damman est le namedropping. Peter Thiel (PayPal), Sean Parker (Napster, Facebook, Spotify), Lorenz Bogaert (Netlog). Les mots tels que ‘San Francisco’ et ‘Silicon Valley’ attirent l’œil. Il est donc clair que la horde de jeunes entrepreneurs reçoit beaucoup de crédit de la part de la presse. Des mots tels que ‘innovation’ et ‘avenir’ apparaissent également : ici, c’est les rêves qu’on vend. Comme nous l’avons déjà dit, la presse est fascinée par cette génération jeune et ambitieuse. Ils représentent une histoire nouvelle et fraiche, qui se raconte elle-même.

Pour la presse, les entrepreneurs de cette génération sont intimement liés les uns aux autres (avec l’exception de Geerdens, qui est d’une autre génération). Dans pratiquement chaque interview avec l’un, vous retrouvez des éléments qui vous conduisent à l’autre : De Halleux est conseiller chez Storify et a investi dans Twitspark, mais pour la presse, cette affinité va bien plus loin que le côté purement financier.

Sébastien de Halleux:

Dries Buytaert (Acquia, Drupal)

Inge Geerdens: 

 

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