Le rôle du PDG en matière de communication est un thème très largement débattu au sein des entreprises. Les PDG doivent-ils être actifs sur Twitter et présents dans les médias ou doivent-ils plutôt tenir les rênes de l’entreprise ? Certains affirment que « pas de nouvelles, bonnes nouvelles » devrait être le leitmotiv des PDG. Cependant, ce n’est pas parce que les PDG préfèrent rester en dehors des projecteurs que cette approche est nécessairement la meilleure option pour eux et pour l’entreprise.

Nous avons recueilli quelques témoignages et une série d’exemples afin d’organiser un webinar sur le thème « PDG : outils ou armes de relations publiques ? ». Les CEO/PDG constituent en effet une arme de communication puissante s’ils sont utilisés correctement. Voici le résultat de nos investigations.

Le CEO se considère le guardien de la réputation de l’entreprise

Commençons par examiner ce que les PDG attendent de la communication. S’inquiètent-ils même des RP et des médias ? S’il est vrai qu’ils ne s’encombrent pas des détails de la théorie des médias, il n’en reste pas moins qu’ils considèrent la notoriété de l’entreprise comme l’un de ses atouts les plus déterminants. Voici les résultats d’une étude qualitative menée parmi 14 PDG d’entreprises de premier plan:

« Les PDG estiment être les dépositaires de la gestion de la notoriété de l’entreprise. Ils s’accordent à reconnaître que la réputation est peut-être son atout le plus important et poursuivent en indiquant qu’ils sont les gardiens de cette notoriété quand ils sont à la tête de l’entreprise. »

La réputation de l’entreprise est comme une montre de famille qui passe de génération en génération : vous la conservez pour la prochaine génération et vous entendez bien la transmettre en parfait état de marche, en la dotant au passage d’une valeur ajoutée. La relation entre la notoriété d’une entreprise et sa valeur est assez complexe : selon l’enquête, il existe une forte corrélation entre la capitalisation de marché et la notoriété : « La notoriété est créditée d’un rôle clé dans la création de capitalisations de marché pour une entreprise et de nombreux observateurs sont d’avis qu’il convient de la traiter comme son actif le plus important à long terme. »

Par ailleurs, il existe entre la réputation d’un PDG et la notoriété de l’entreprise un lien fort, émaillé de bien des dangers: « Les PDG reconnaissent l’existence d’un lien fort et potentiellement dangereux entre la notoriété de l’entreprise et la personne qui la dirige. Un PDG va même jusqu’à affirmer que la notoriété de l’entreprise et la réputation du PDG sont une seule et même chose. »

La meilleure illustration de cet état de fait est la gaffe de communication commise par le PDG d’Adobe, Shantanu Narayen. Au cours d’une réunion avec la presse, en Australie, il a maladroitement utilisé à trois reprises une tactique de dérobade. La Creative Suite d’Adobe est 1 400 USD plus chère en Australie qu’aux États-Unis, alors qu’elle est fournie par internet. Cette situation est difficile à expliquer aux clients et Narayen n’a même pas fait l’effort d’esquisser ne fut-ce qu’une réponse… Au lieu de fournir une explication, il a en effet à plusieurs reprises éludé la question comme en témoigne la vidéo suivante :

Cela affecte-t-il la manière dont le public appréhende l’entreprise, voire ses produits ? Certainement ! Quand vous effectuez une recherche sur Google avec la séquence clé « Adobe Creative Cloud », vous arrivez sur un blog qui indique (dans une analyse par ailleurs favorable) : « Il se peut que vous ayez le sentiment de ne pas être le propriétaire réel du logiciel [quand vous souscrivez la solution SaaS] et je le comprends. Il se peut aussi que vous ne fassiez pas confiance à Adobe pour différentes raisons, dont les pirouettes plutôt douteuses, voire louches, utilisées par le PDG pour éviter de parler des véritables problèmes. Je le reconnais également. » (Source)

Vous constatez d’emblée que le blogueur identifie l’entreprise au PDG, précisément comme le redoutent les PDG. L’auteur indique en effet qu’il ne fait pas confiance à l’entreprise en raison du comportement même du PDG.

Warren Buffett l’a jadis très bien exprimé : « Nous pouvons nous permettre de perdre de l’argent, même beaucoup d’argent, mais nous ne pouvons pas nous permettre d’entamer notre capital réputation, pas même une parcelle de celui-ci. » (Berkshire Hathaway – lettre aux actionnaires, 2010)

En d’autres termes, on ne risque pas de se tromper en disant que les PDG s’inquiètent de l’effet de la communication sur la notoriété de l’entreprise. En fait, l’un des résultats des entretiens avec les PDG dont il est question ci-dessus réside dans le fait qu’ils estiment que le rôle d’un professionnel des RP dépend dans une très large mesure de la manière dont il ou elle est capable d’appréhender les implications stratégiques des efforts déployés dans les médias, les médias sociaux et la communication sur la notoriété de l’entreprise.

Je conclurais également que la gestion de l’« image de marque personnelle » du PDG ne s’apparente aucunement à un projet de vanité. Elle est difficile, certes, mais elle est aussi nécessaire. Une des idées phares de la gestion de la marque réside en ceci que les observateurs feront de toute façon preuve d’anthropomorphisme quand ils considèrent les marques. En d’autres termes, ils projettent des caractères humains sur la marque, qu’elle adopte ou nom une « stratégie de marque ». Il en va de même pour la « marque » du PDG : « Les parties prenantes projettent systématiquement une marque personnelle sur le PDG et, à moins qu’elle ne fasse l’objet d’une gestion active, une image fausse et défavorable peut se faire jour. Dans certains cas, l’impact sur la réputation personnelle et la notoriété de l’entreprise peut être profond. » (3)

Gagnants et perdants de la scène médiatique

Ensuite, afin de comprendre dans quoi nous nous embarquons, il est utile de comprendre comment les médias traitent les PDG. Chez FINN (en partenariat avec nos amis d’Auxipress), nous faisons chaque année le compte du nombre de fois que les PDG sont mentionnés dans la presse belge. Une tendance très nette se dégage : il semble que la presse appréhende le monde par le petit bout de la lorgnette. En effet, elle ne s’attarde que sur quelques « gagnants » et « perdants ».

Cette tendance se reflète aussi dans les recherches internationales : « Ces résultats indiquent que les journalistes choisissent résolument de se focaliser sur un nombre relativement réduit de gagnants ou de perdants quand ils couvrent la question des PDG. Le fait de se polariser sur quelques PDG qui deviennent des personnalités familières aide à alimenter un certain divertissement, étant donné que les lecteurs peuvent ainsi nourrir des attentes relatives aux personnalités et actions d’individus particuliers. » (3)

Nous avons déjà abordé dans un article précédent une étude danoise qui a mis en lumière le même phénomène dans le monde des experts : l’« effet Mathieu » se manifeste dans la presse. Alors que les journalistes sont toujours à l’affût de nouveaux visages et voix, il n’en demeure pas moins que devenir la coqueluche des médias est une entreprise laborieuse. Les personnes qui sont déjà sous le feu des projecteurs médiatiques le seront encore davantage à l’avenir. C’est une chambre de résonance en quelque sorte.

Qu’est-ce que cela signifie pour votre organisation ou entreprise ? Qu’elle est juste trop petite pour entrer au panthéon des « stars » ? Qu’elle devrait abandonner l’idée que son PDG devienne un jour un « leader d’opinion » ? Pas vraiment. Pas du tout, même… En effet, il n’existe pas de relation directe entre la taille d’une entreprise et le statut du PDG dans les médias. Même des critères comme le chiffre d’affaires ou l’effectif d’une entreprise ont peu d’emprise sur ce statut, quoiqu’il semble exister un lien entre le nombre d’actions en circulation et la couverture médiatique. Ainsi, même si les PDG d’entreprises cotées en bourse semblent être avantagés, « il n’existe pas d’ensemble cohérent de critères qui prévoie quelles entreprises verront leur PDG traiter comme une célébrité par les principaux journaux », comme on peut le lire dans d’étude de James Hamilton et Richard Zeckhauser.

Parfait ! Mettons dès lors tout en œuvre pour que notre CEO soit célèbre !

Minute papillon ! L’exposition aux médias est toutefois associée à certains risques… non négligeables. La communication sur les PDG n’a pas pour objectif de rendre le PDG célèbre. Il serait par ailleurs dangereux pour le PDG de céder à l’ivresse des feux de la rampe. En effet, les PDG qui deviennent des célébrités génèrent plus d’argent. Il se peut alors qu’ils reçoivent plus d’offres d’autres entreprises… Et le remplacement du « patron » est associé à des coûts très élevés pour toute entreprise.

Les chercheurs indiquent que, dans certains cas, le fait de gravir les échelons de la célébrité peut se faire au détriment des intérêts des actionnaires et peut même être considéré comme une « consommation ». En d’autres termes, ce n’est pas une bonne idée si le PDG s’emploie à devenir un chouchou des médias pour des raisons étrangères aux objectifs stratégiques de l’entreprise.

Lee Iacocca, qui est devenu célèbre par le biais du redressement chez Chrysler, en est un bon exemple. Dans « Good to Great » (Jim Collins), vous pouvez trouver cette citation extraite du Wall Street Journal : « M. Iacocca a dirigé la rénovation de la Statue de la Liberté, a rejoint une commission du Congrès sur la réduction du budget et a écrit un second livre. Il a eu sa propre rubrique dans un journal, a acheté une villa italienne et a commencé à embouteiller son vin et son huile d’olive. Selon les critiques, tous ces éléments l’ont distrait de sa mission et ont été à la base des problèmes actuels de Chrysler. Que cela le détourne des objectifs fondamentaux de l’entreprise ou non, il apparaît clairement que le fait d’être un héros populaire est une activité secondaire très exigeante. »

Cela va même plus loin. La recherche montre que les PDG qui font les yeux doux aux médias en offrant des « actualités magazine » à propos de leur personne (leur haras, leur cave à vin, leur collection d’art…) se retrouvent souvent enlisés dans des scandales, doivent remettre leur démission, ou se retrouvent mis en examen. Bernie Madoff et sa collection d’art en sont le plus parfait exemple.

« D’accord, retirons donc notre PDG de toute couverture médiatique ! »

Rebelote, ce n’est pas non plus une bonne idée.

N’oublions pas que la communication est un processus bilatéral. En vous ouvrant (soit sur les réseaux sociaux soit dans les médias), vous pouvez obtenir une information non retouchée. Cette approche est non seulement importante pour montrer et vivre des valeurs telles que la transparence et l’empathie, mais constitue également une bonne expérience pour le PDG, qui est ainsi exposé à des échanges « bruts ».

Que vous le vouliez ou non, les PDG sont souvent entourés de toute une série de gens qui veulent leur faire plaisir. Les médias et d’autres parties prenantes ne sont pas enclins à ménager les sentiments des PDG et cela permet de comprendre clairement comment l’entreprise se débrouille dans le « monde réel » : « Le PDG joue un rôle déterminant dans la création d’une entreprise ‘à l’écoute’ ». (7)

En conclusion, on peut dire qu’il existe une différence entre un « communicateur vedette », en d’autres termes une personne qui parvient à conforter la notoriété et la stratégie de l’entreprise grâce ses excellentes aptitudes à communiquer, et une célébrité qui a tout pour alimenter l’attention des médias et sa réputation.

Autrement dit : « Le capitaine d’entreprise moderne doit être à l’image du samurai : il doit être capable de maîtriser les arts martiaux pour mener son entreprise à la victoire, tout en apprenant l’art du poète ou la réflexion du philosophe. » (7)

Quelles sont donc les pratiques d’excellence en matière de communication pour les PDG ?

Nous avons déjà abordé le sujet des RP du PDG dans un blog consacré à la stratégie des RP de Steve Jobs. Vous pouvez lire le blog en suivant ce lien, mais il est bon de rappeler quelques éléments que Jobs a parfaitement compris : les RP sont décisives en particulier pour une jeune entreprise. Après avoir reçu son premier chèque de capital-risque, le premier point à son ordre du jour a été d’engager Regis McKenna, la figure de proue des RP techniques de Silicon Valley. (Je pense qu’un Européen serait plutôt tenté d’engloutir l’intégralité de son budget dans le produit.) Jobs a compris que le fait de donner d’entrée de jeu la bonne image était décisif, mais également que les médias raffolent des histoires de jeunes entrepreneurs effrontés (et c’est encore toujours le cas).

C’est à partir de ce constat qu’Al et Laura Ries ont remarqué (dans « The Rise of PR and the Fall of Advertising ») que Ben&Jerry’s ne serait pas la crème glacée très connue sans les fondateurs Ben et Jerry – dans ce cas de figure, les valeurs de la marque sont évidemment parfaitement en phase avec les leurs. C’est tout bénéfice de les laisser jouer le rôle de porte-parole de la marque.

Au fil du temps, Jobs a affiné sa compréhension des RP avec l’aide bienveillante de McKenna. Il a ainsi peaufiné les lancements de produit d’Apple jusqu’à les ériger en véritable référence du secteur, mettant en scène le PDG qui lance lui-même les produits (il suffit d’observer aujourd’hui Steve Ballmer et Stephen Elop pour s’en convaincre) et exploitant la force de la marque Apple pour vendre des interviews exclusives au plus offrant – rédigez un article favorable à Apple et vous pourriez alors peut-être avoir un entretien personnel avec Jobs.

Un autre grand exemple est Tony Hsieh, dont le livre intitulé « Delivering Happiness » est devenu si populaire que Hsieh a commencé une tournée « Happiness ». Il a ainsi sillonné en bus les États-Unis pour partager sa vision sur la manière de rendre les clients heureux. Hsieh était le PDG de Zappos, un détaillant en ligne spécialisé dans la chaussure. Pourtant, il n’est pas devenu un leader d’opinion dans la chaussure ou le commerce de détail. Il s’est plutôt emparé d’un morceau d’un concept bien plus vaste : le bonheur. Et c’est ici que cela se corse : la communication d’un PDG tel que Hsieh à propos de valeurs (« bonheur ») et son accession au statut de leader d’opinion en matière de culture d’entreprise (orientée sur la création du bonheur des clients) ont eu des répercussions en chaîne sur sa société Zappos.

Le même constat s’applique à Buffer, l’appli de médias sociaux qui permet aux utilisateurs de poster leur message simultanément sur différents réseaux sociaux. Cependant, Leo Widrich (CMO) et Joel Gascoigne (PDG) revendiquent un territoire beaucoup plus vaste, celui de la productivité. Sur leur blog extrêmement populaire, ils ont posté des messages sur tout ce qui touche de près ou de loin à la productivité, y compris l’alimentation et les heures de sommeil nécessaires…

Grâce aux blogs et aux médias sociaux, vous n’êtes désormais plus dépendant des médias traditionnels ou de base, qui s’en tiennent parfois à un message indésirable pour votre organisation ou entreprise. Au moment de l’enquête sur Leveson, le nom de Rupert Murdoch est devenu synonyme d’absence de transparence et d’empathie – une éminence grise, sans chaleur humaine, qui magouille dans les coulisses du pouvoir avec des politiciens.

Les médias n’étaient pas une option pour Murdoch, qui s’est dès lors tourné vers Twitter, où sa sincérité sur les transactions commerciales comme MySpace a généré une couverture médiatique à tout le moins neutre, mais qui lui a parfois valu de l’admiration. En se rendant accessible au public, il s’est attaché à faire voler en éclats l’image d’éminence grise, froide, magouilleuse, à bord son jet privé. Pour ma part, j’estime que la présence de Murdoch sur Twitter est une réussite en raison de l’authenticité du propos. Nombreux sont également ceux qui ont estimé qu’il y avait un petit quelque chose d’intrinsèquement « comique » de voir cette « personne âgée » se hasarder sur Twitter pour parler sans détour. L’une des premières questions sur Twitter a été : est-ce vraiment lui ? Elle résulte précisément du paradoxe de la présence de l’homme emblématique des anciens médias sur Twitter.

Conclusions : quand et comment la communication d’un PDG est-elle utile et efficace ?

Sur la base de tout ce qui précède, je pense qu’une image de la communication du PDG se dégage progressivement. Selon moi, il apparaît clairement que la communication du PDG ou du fondateur a peu d’effets secondaires tant que vous créez une marque et êtes avide de faire de la publicité, de quelque nature qu’elle soit, que ce soit pour le produit, l’entreprise, les collaborateurs, voire le marché (s’il s’agit d’un modèle d’affaires très récent, comme la « sharing economy » d’Airbnb ou le streaming de musiques).

Au cours premières années d’une entreprise, tout PDG ou fondateur se confond avec la marque. Le fondateur est, dans une large mesure, la raison pour laquelle des investisseurs et les premiers employés sont attirés. Quant aux valeurs de l’entreprise, elles seront presque nécessairement alignées sur la personnalité de l’équipe dirigeante. Les choses deviennent quelque peu différentes quand vous êtes Coca-Cola, General Electric ou Arcelor Mittal.

En 1999, Douglas Ivester a écrit une lettre d’excuse à la Belgique en raison d’une crise alimentaire – quelques dizaines d’enfants ont été victimes de nausées après avoir bu du Coca-Cola (au final, il est apparu qu’il s’agissait d’une hystérie collective). Malheureusement, la communication n’a pas totalement eu l’effet escompté, en partie parce que Douglas Ivester était un quinquagénaire dont le moindre centimètre respirait l’archétype du patron américain. Et voilà qu’il écrivait une lettre dans un journal comme porte-parole de Coca-Cola, une marque qui dépense des millions d’euros par an pour des publicités avec de superbes adolescents qui s’amusent.

Un magazine belge a commencé à se gausser de cet étranger quinqua qui commençait à écrire des lettres, en déclarant qu’Ivester était leur nouveau « correspondant » et en lui adressant des lettres pendant les mois qui ont suivi et même quelques années plus tard, bien après qu’Ivester avait quitté le poste de PDG.

Des cadres supérieurs royalement payés d’entreprises cotées en bourse ne sont pas des «°quidams » et il est un peu étrange qu’un PDG dont le salaire annuel s’élève à plusieurs millions se mette à parler au commun des mortels. Cet effet de distanciation est confirmé par les études : « les employés de première ligne sont plus efficaces que les PDG pour communiquer à propos de sujets liés à l’expérience des clients » (Stephens & Faranda, 1993).

Dans le cadre de nos recherches, nous avons aussi remarqué que les rémunérations des dirigeants peuvent devenir un sujet « toxique ». Il est en effet malvenu pour un directeur très grassement payé de parler de la crise de l’euro. Il va de soi que vous avez le droit d’exprimer vos inquiétudes à propos de la position concurrentielle de votre pays à l’aune de la protection organisée des travailleurs. Mais alors, vous ne devez pas vous étonner si un journaliste rétorque que c’est très facile pour vous d’en parler, vous qui vivez en Suisse (un « paradis fiscal ») et gagnez 3 millions de dollars.

C’est exactement ce qui est arrivé à Patrick De Maeseneire, PDG d’Adecco, quand il a donné une interview à Kanaal Z l’année dernière. En sa qualité de PDG d’Adecco, il est extrêmement bien positionné pour parler du marché de l’emploi et du dialogue social, mais ses propres rémunérations ont miné sa position de « leader d’opinion » sur ces questions. Ces mises en garde s’appliquent toutefois presque exclusivement pour des directeurs qui ont un profil vraiment « financier » à la tête d’entreprises cotées en bourse, en particulier des entreprises du Fortune 500.

En cas de doute, cueillez les fruits mûrs

Cependant, il serait erroné de conclure de ce qui précède que les PDG devraient rester invisibles… Les études montrent que tant les employés de l’entreprise que le public sont impatients de découvrir les projets et les actes du PDG.

Comme l’un des chercheurs l’a justement épinglé : « la plupart des lecteurs considèrent le PDG comme un porte-parole qui représente les valeurs de l’entreprise et sont impatients d’écouter la voix du ‘maître’ » (Ferns et al., 2008).

C’est surtout la jeune génération qui s’attend à ce que les dirigeants d’une entreprise montrent ce qu’ils représentent. Comme le professeur Pedro De Bruyckere l’a conclu dans une étude publiée l’année dernière : « la ‘Génération Y’ recherche un leader, un porte-étendard qui partage leurs valeurs et qu’ils peuvent suivre. »

Les PDG devraient être conscients de leur poids sur un certain nombre de thèmes comme les ressources humaines, la responsabilité sociale de l’entreprise et tout ce qui concerne les relations publiques, la stratégie et le métier. Il s’agit là des fruits mûrs, en d’autres termes, il y a un faible risque, mais un potentiel élevé pour le leadership d’opinion du PDG et, partant, pour l’entreprise. Ce serait faire montre d’une trop grande aversion au risque que d’éviter les contacts avec les médias. De cette manière, vous risquez de passer à côté de belles opportunités…

Sources

  • « CEO’s views on reputation management », Journal of Communication Management, vol. 9
  • « Media coverage of CEO’s: Who, What, Where, When? », James Hamilton (Duke) et Richard Zeckhauser (Harvard)
  • « Satisfaction, corporate credibility, CEO reputation and leadership effects on public relationships », Journal of Targeting, Measurement and Analysis for Marketing (2011) 19
  • « How journalists choose experts », Kristien Vermoesen « Good to Great », Jim Collins
  • « Managing corporate communications », Rosella Gambetti (Ed.) « 6 PR Lessons of Steve Jobs », Kristien Vermoesen
  • « FINN Auxipress CEO Media Ranking », Kristien Vermoesen
  • « The fall of advertising and the rise of PR », Al & Laura Ries
  • « Adobe CEO Dodges Pricing Questions », Engadget

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